Série indienne ~ La Bhagavad-Gita, un classique universel au secours de notre temps

La plus célèbre des œuvres sanskrites qui a su parler aux lecteurs bien au-delà des frontières du Subcontinent. Une invitation au renoncement, au yoga et à la maîtrise des sens, seule voie vers le détachement dans l’action.

Dix classiques pour regarder l’Inde dans les yeux

Avec la série indienne dont les dix parutions prévues courront sur toute l’année 2022, les Belles Lettres vous convient à vous initier aux secrets immensément riches de l’Inde classique.

Au miroir de Scott Pennor’s

Dans la ligne droite de la politique éditoriale des Belles Lettres, cette série cherche à éclairer une culture par ses textes : celle de l’Inde et « des Indes ».

Les dix textes retenus font référence les uns aux autres de sorte que la lecture d’un des volumes éclaire celle des autres. De nombreuses références croisées entre les volumes accompagnent le lecteur dans cette démarche de construction progressive d’un tableau culturel polychrome.

En miroir de chaque texte, des illustrations originales offrent un éclairage contemporain sur ces œuvres méconnues du lectorat français. Ces créations graphiques sont signées par de talentueux artistes de renom.

Pour la Baghavad-Gita, c’est Scott Pennor’s qui a mis toute son intuition créatrice au service des idées et des concepts du grand texte. Il avait déjà donné vie aux Pensées de Marc Aurèle dans une édition aujourd’hui encore remarquée et souvent citée. Plus récemment, il a signé l’identité visuelle de la Série du Centenaire.

Distillées dans le texte avec la légèreté de l’élégance et la force du pouvoir d’évocation qu’elles soulèvent, ces illustrations scellent sans l’étouffer le magnifique message universel d’un classique qui nous aide aujourd’hui encore à affronter le monde.


La Bhagavad-Gita

Abandonne toute frayeur et relève-toi car je t’aime.

Préface inédite de Jean-Claude Carrière

Probablement la plus célèbre des œuvres sanskrites classiques, la Bhagavad-Gita n’est pas seulement un texte fondamental de la pensée indienne : depuis ses premières traductions européennes au XVIIIe siècle et sa lecture par les plus grands penseurs, elle a aussi eu une influence considérable sur la pensée moderne
occidentale. 

*

Incluse dans l’immense épopée du Mahabharata, elle se présente sous la forme d’un dialogue entre le dieu Krishna et le guerrier Arjuna alors que celui-ci doit sonner le début d’une immense lutte fratricide qui, il le sait, ravira la vie à d’innombrables membres de sa famille, alliés ou rivaux. Par son discours, Krishna montre à Arjuna la voix à suivre, celle du renoncement, du yoga et du détachement dans l’action rendu possible uniquement par la maîtrise des sens.


Note éditoriale

~ La présente traduction a été publiée pour la première fois en 1922 aux éditions Bossard. Elle a été reprise et amendée en 1944 pour une édition bilingue dans la collection « Émile Senart » des Belles Lettres (3e édition en 1967) puis republiée en 2004 dans la collection « Classiques en Poche » des Belles Lettres.

~ Les illustrations inédites accompagnant le texte sont de Scott Pennor’s.
Jean-Claude Carrière a composé la préface à cette traduction en 2021, quelques mois avant son décès. Puisse cette édition lui rendre hommage.


« Celui qui fait sa joie de la vérité et de la science, qui est concentré, maître de ses sens, de ce yogin qui ne fait de l’or plus de cas que d’une pierre ou d’une motte de terre, on dit qu’il est parvenu au yoga. »

Extrait de la sixième lecture : la contemplation

Bhagavat dit :

Celui qui, sans se soucier du fruit des actes, accomplit les actes prescrits, c’est celui-là, non celui qui néglige le feu sacré et les rites, qui est vraiment un détaché, un yogin.

Ce qu’on appelle renoncement n’est, sache-le bien, ô Pāndava, rien autre que le yoga ; car on ne peut être un yogin sans avoir renoncé au désir.

Pour s’élever au yoga, l’action est l’arme du sage ; c’est le calme quand il s’est élevé au yoga.

Car c’est lorsqu’il n’a plus d’attachement ni aux objets des sens, ni aux actes, que, affranchi de tout désir, il s’est élevé au yoga.

C’est par soi-même que l’on se sauve, que l’on échappe à la perdition ; l’homme est à lui-même son ami, à lui-même son ennemi.

Il est à lui-même son ami celui qui s’est vaincu lui-même ; quant à celui qui n’est pas maître de soi, il est à lui-même comme un ennemi.

Celui qui s’est vaincu, qui est dans le calme, celui-là demeure parfaitement recueilli, dans le chaud comme dans le froid, dans le plaisir comme dans la douleur, voire dans l’honneur comme dans le mépris.

Celui qui fait sa joie de la vérité et de la science, qui est concentré, maître de ses sens, de ce yogin qui ne fait de l’or plus de cas que d’une pierre ou d’une motte de terre, on dit qu’il est parvenu au yoga.

Honneur à celui qui considère du même œil compagnons et amis, ennemis ou indifférents, inconnus, gens haïssables ou parents, hommes vertueux ou pécheurs.

Que le yogin toujours se gouverne lui-même, retiré, solitaire, l’esprit dompté, sans désir, sans bien.

 Dans un endroit pur qu’il se dresse un siège solide, ni trop haut ni trop bas, couvert d’étoffe, d’une peau et de kusha ;

Assis sur ce siège, l’esprit concentré, ayant enrayé toute activité de la pensée et des sens, qu’il exerce le yoga pour se purifier.

Impassible, tenant le corps, la tête et le cou droits et immobiles, qu’il fixe son regard sur l’extrémité de son nez sans le laisser errer ailleurs ;

Parfaitement calme, libre de crainte, fidèle à la chasteté, la pensée maîtrisée, l’esprit plein de moi, qu’il demeure concentré, tendu vers moi.

Le yogin à l’intelligence domptée, qui toujours s’exerce de la sorte, atteint le repos, la paix suprême qui a son siège en moi.

Ecouter cet extrait lu :


Renoncement et délivrance

Extrait de la dix-huitième lecture

Bhagavat dit :

S’abstenir des actes qu’inspire le désir, voilà ce que les maîtres entendent par détachement ; renoncer à tout fruit des actes, c’est ce que les hommes éclairés appellent renoncement.

Suivant certains sages, tout acte implique faute, et il faut renoncer à tous ; d’autres estiment qu’il ne faut pas renoncer aux pratiques du sacrifice, de l’aumône, ni de la pénitence.

Écoute donc ce que j’enseigne sur le renoncement, ô le meilleur des Bhāratas. Du renoncement, ô tigre des hommes, on distingue trois sortes.

Il ne faut pas renoncer aux pratiques du sacrifice, de l’aumône et de la pénitence ; il faut les  accomplir.

Le sacrifice, l’aumône et la pénitence sont pour les sages des moyens de sanctification.

Mais ces pratiques mêmes, il faut les accomplir sans s’y attacher, ni à leurs fruits ; voilà, ô fils de Prithā, quelle est ma formelle et suprême doctrine.

Il ne convient pas de s’affranchir d’un acte prescrit ; y renoncer, c’est s’égarer, c’est être sous l’empire du tamas.

Si quelqu’un, par crainte de la souffrance physique, se dérobe à quelque acte, le jugeant pénible, il agit sous l’empire du rajas ; il ne saurait cueillir le fruit du renoncement.

Accomplis l’acte prescrit, ô Arjuna, par la seule raison qu’il doit être accompli, sans attachement, sans égard pour ses fruits ; c’est là le renoncement qui relève du sattva.

L’homme qui pratique vraiment le renoncement, l’homme pénétré de sattva, affranchi du doute, n’éprouve pas plus de répulsion pour un acte pénible que d’attrait pour un acte agréable.

Quant à renoncer complètement à tous les actes, l’âme, liée au corps, ne le peut pas ; c’est celui qui renonce aux fruits des actes qui vraiment pratique le renoncement.

Le fruit des actes est de trois sortes : désagréable, agréable, mélangé ; il est le partage, après cette vie, de ceux qui n’ont pas pratiqué le renoncement ; jamais de ceux qui ont vécu détachés.


LA BHAGAVAD-GITA

Traduit du sanskrit par Émile Senart
Préface de Jean-Claude Carrière
Illustré par Scott Pennor’s

Lire relié • 126 pages • 18 illustrations en couleurs • 12,5 x 19 cm • 21 €

En librairie le 9 septembre 2022, ou sur notre site internet.


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