La grammaire d’Isidore de Séville

Héritière de la grammaire antique, puisant dans des sources variées et comportant de nombreuses citations d’auteurs anciens, la somme grammaticale d’Isidore a exercé une immense influence au Moyen Âge. La voici traduite pour la première fois en français, introduite et commentée en édition bilingue par Olga Spevak.

Ce volume de la collection ALMA (Auteurs Latin du Moyen Âge) propose, soigneusement établi d’après la tradition manuscrite, le texte latin de cette « grammaire » d’Isidore, et, pour la première fois, sa traduction en français, avec une copieuse introduction et d’abondantes notes destinées à faciliter la lecture et l’interprétation d’un enseignement concis, technique et fondamental.

L’éditrice du volume

Olga Spevak

Maître de conférences à l’université de Toulouse 2, elle enseigne la philologie latine et grecque. Elle a déjà édité et traduit, aux Belles Lettres le livre XIV des Etymologiae, consacré à la Terre.

Source photographique

De Grammatica

La grande encyclopédie d’Isidore de Séville (560-636) s’ouvre par un cycle sur les sept arts libéraux, dont la grammaire représente le premier. Dans la présente introduction, nous nous concentrerons sur le texte du livre premier des Étymologies, intitulé De grammatica. La grammaire est une discipline qui a une tradition longue et complexe. Nous résumerons d’abord la question de la constitution de la grammaire dans l’Antiquité ainsi que les notions essentielles qui en font partie – auxquelles il y a des allusions tout au long du livre premier. Nous présenterons ensuite le plan et le contenu du livre De grammatica ; à cette occasion, nous développerons certains points qui, à notre sens, nécessitent des précisions pour faciliter au lecteur moderne l’orientation dans la matière. Enfin, nous étudierons les aspects propres à la présente édition : les manuscrits, les éditions précédentes, l’établissement du texte, la question de la graphie ainsi que les sources et les testimonia.

(…)

Dans le livre premier de ses Étymologies, Isidore de Séville propose (…) une somme du savoir sur la grammaire, puisée dans des sources variées et émaillée des citations de poètes et des mentions d’auteurs de référence (tels Varron, Virgile ou Donat). Les Étymologies ont exercé une très grande influence au Moyen Âge (…) . Elles ont contribué à la préservation de la culture antique et à une meilleure éducation. Cependant, le savoir antique n’a été souvent diffusé que par l’intermédiaire de traités comme celui-ci, les livres «païens» n’ont été disponibles qu’à une petite élite. Dans cet ordre d’idées, il convient de rappeler qu’Isidore lui-même prônait des restrictions d’accès aux livres païens. Cependant, comme l’a souligné M. Irvine (1994, 241-243), le traitement concis de la matière – bien que parfois imprécis, erroné ou incomplet –, la sélection des passages ainsi que l’arrangement du texte ont valu à Isidore un grand succès.

Le plan du De Grammatica

Le livre premier des Étymologies est consacré à la grammaire. Après un bref exposé sur la discipline et les arts libéraux(chap.1-2), Isidore traite des lettres (chap.3-4) pour passer à la grammaire et à ses parties constitutives (chap.5). Il étudie ensuite les classes de mots, qui font l’objet de l’Ars minor et, en même temps, du livre 2 de l’Ars maior de Donat (chap. 6-14). Il enchaîne avec la matière contenue dans le livre 1 de l’Ars maior, en laissant de côté la voix et les lettres (déjà traitées) : syllabe, pieds métriques, accents et signes de ponctuation (chap. 15- 20). Ensuite, il traite des sujets qui ne font pas partie de la grammaire de Donat : signes critiques et autres signes (chap. 21-26), orthographe (chap. 27) et méthodes d’interprétation (analogie, étymologie, différence et glose, chap.28-31). Après ces digressions, il reprend l’Ars maior, son livre 3, pour étudier les barbarismes, les solécismes, les défauts, les métaplasmes, les figures et les tropes (chap.32-37). Enfin, il clôture le livre premier par les genres littéraires : prose, mètres, fable et histoire (chap. 38-44).

Extraits de l’introduction.

Les lettres latines – Extrait de la traduction

Pour plus de commodité de lecture, les notes présentes en fin de volume ont été ici retirées.

La nymphe Carmentis a été la première à transmettre les lettres latines aux habitants de l’Italie. On l’a nommée Carmentis parce qu’elle prédisait l’avenir en vers (carmen), mais elle s’appelait proprement Nicostrate. 2. Les lettres sont soit communes, soit libérales. On dit «lettres communes» parce que beaucoup de gens les emploient pour un usage commun, comme écrire et lire. On dit «lettres libérales» parce que seuls les connaissent ceux qui rédigent les livres (libri) et qui savent comment parler et composer correctement.

3. Il y a deux sortes de lettres ; en effet, elles se divisent principalement en deux groupes : les voyelles et les consonnes. Les voyelles sont celles qui se prononcent de manières variées par l’ouverture directe de la bouche sans aucun obstacle. Et on les appelle «voyelles» parce qu’elles remplissent la voix à elles seules et parce qu’elles constituent une syllabe à elles seules, sans aucune consonne attachée. Les consonnes sont celles qui se forment par des mouvements divers de la langue ou par la pression des lèvres. Et on les appelle «consonnes» parce qu’elles ne produisent pas de son à elles seules, mais elles produisent un son ensemble (consonant) avec des voyelles adjointes. 4. Les consonnes se répartissent en deux groupes : les semi-vocales et les muettes. On les appelle semi-vocales (semiuocales) parce qu’elles ont «une certaine moitié (semis) de voyelles». Elles commencent par la voyelle e et se terminent par leur son naturel, tels F, L, M et les autres. Les muettes (mutae) s’appellent ainsi parce qu’on ne peut pas les émettre sans l’appui des voyelles. En effet, si on leur enlève le son final, qui fait partie de la lettre, on entendra un bruit, tels B, G, D et les autres. Les voyelles, les semi-vocales et les muettes ont été nommées «sonores», «semi-sonores» et «non sonores» par les Anciens.

Se procurer l’ouvrage

Isidore de Séville, Étymologies. Livre I – La Grammaire

Texte établi, introduit, commenté et traduit par Olga Spevak

Livre broché, 12 x 19 cm – CLVIII + 474 pages, bilingue latin-français, avec vaste bibliographie et index.

En librairie le 10 janvier 2020- EAN13 : 9782251450537 – 65 €

Les volumes des Etymologiae d’Isidore de Séville disponibles

La collection Auteurs Latins du Moyen Âge accueille des éditions d’œuvres représentatives de l’humanisme médiéval. Poèmes, œuvres en prose et traités, les ouvrages des Auteurs latins du Moyen Âge abordent de nombreux domaines du savoir médiéval comme la philosophie, la grammaire, les sciences ou la théologie. La collection compte notamment l’édition internationale des Étymologies d’Isidore de Séville.

Les ouvrages de la collection constituent des éditions critiques, comprenant un texte nouvellement établi, un apparat critique détaillé, une traduction et des notes, ainsi qu’une introduction ou sont exposés succinctement les problèmes du texte et les principes de son édition. Introduction, traduction et annotations peuvent être rédigées en français, ou parfois en allemand, anglais, espagnol, italien, portugais – au choix de l’éditeur et suivant les besoins du volume.

Composition des Étymologies, et indication de la traduction disponible aux Belles Lettres, le cas échéant :

Livre I – De Grammatica / La Grammaire, édition latin – français, par Olga Spevak, 2020 – Voir ce volume

Livre II – De Rhetorica et Dialectica / Rhetoric, édition latin – anglais, par P.K. Marshall, 1983 – Voir ce volume

Livre III – De quattuor disciplinis mathematicis / Les mathématiques, édition latin – français, par Jean-Yves Guillaumin, 2009 – Voir ce volume

Livre IV – De medicina

Livre V – De legibus et temporibus / Sobre las leyes – Sobre los tiempos, édition latin – espagnol, par Andrés Santos, V. Yarza Urquiola, 2013 – Voir ce volume

Livre VI – De libris et officiis ecclesiasticis / De las Sagradas Escrituras, édition latin -espagnol, par César Chaparro-Gomez, 2012 – Voir ce volume

Livre VII – De deo, angelis et sanctis / Dieu, les anges, les saints, édition latin – français, par Jean-Yves Guillaumin, Pierre Monat, 2012 – Voir ce volume

Livre VIII – De ecclesia et sectis

Livre IX – De linguis, gentibus, regnis, militia, civibus, affinitatibus / Les langues et les groupes sociaux, édition latin – français par Marc Reydellet, 1986 – Voir ce volume

Livre X – De vocabulis

Livre XI – De hominibus et portentis / L’Uomo e i portenti, édition latin – italien, par Fabio Gasti, 2010 – Voir ce volume

Livre XII – De animalibus / Des animaux, édition latin – français, par Jacques André, 1986 – Voir ce volume

Livre XIII – De mundo et partibus / Del mondo e delle sue parti, édition latin – italien par G. Gasparotto, 2004 – Voir ce volume

Livre XIV – De terra et partibus / La Terre, édition latin-français par Olga Spevak, 2011 – Voir ce volume

Livre XV – De aedificiis et agris / Constructions et terres, édition latin – français, par Jean-Yves Guillaumin, 2016 – Voir ce volume

Livre XVI – De lapidibus et metallis / De las piedras y de los metales, édition latin – espagnol, par José Feans Landeira, 2011 – Voir ce volume

Livre XVII – De rebus rusticis / De l’agriculture, édition latin – français, par Jacques André, 1981 – Voir ce volume

Livre XVIII – De bello et ludis / De la guerra y los juegos, édition latin – espagnol par J. Canto Llorca, 2007 – Voir ce volume

Livre XIX – De navibus, aedificiis et vestibus / De naves, edificios y vestidos, édition latin – espagnol, par R. Pantoja Marquez, 1995 – Voir ce volume

Livre XX – De domo et instrumentis domesticis / Nourriture, boisson, ustensiles, édition latin – français par Jean-Yves Guillaumin, 2010 – Voir ce volume

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