Le Goût de l’Histoire, la nouvelle collection de Jean-Claude Zylberstein aux Belles Lettres

Deux ouvrages retentissants ouvrent la nouvelle collection semi-poche dédiée à l’Histoire dirigée par Jean-Claude Zylberstein aux Belles Lettres.

C’est grâce à Alexandre Dumas que j’ai acquis le goût de l’Histoire. Les Trois mousquetaires et Le Comte de Monte Cristo ont commencé par enflammer mon imaginaire. Mais, très rapidement, ces romans pour nous désormais historiques ont affiné mon sens de la chronologie et j’en ai réalisé l’importance : pour savoir qui nous sommes et où nous en sommes. Beaucoup de livres d’histoire sont alors venus prendre place sur les rayons de ma bibliothèque : ces portraits de grands personnages, ces vastes fresques, je l’ai rapidement compris, m’ont permis d’enrichir mes analyses, mes réflexions. Dans le colloque singulier de leur lecture, c’est aussi ma faculté d’introspection qui s’est développée. Des oeuvres classiques comme Les femmes savantes de Molière ou le Lucien Leuwen de Stendhal ont aussi aiguisé ma passion. Longtemps, elle est restée secrète. Jusqu’au moment où, ayant été en situation de la partager publiquement, je me suis aperçu que dans ce domaine de l’édition comme dans d’autres, je pouvais susciter la découverte ou la redécouverte d’ouvrages injustement oubliés ou méconnus. Je considère qu’il s’agit d’une tâche d’utilité publique car les livres d’histoire sont au premier rang de ceux qui contribuent au développement de l’esprit critique, condition nécessaire à mes yeux d’une véritable citoyenneté et facteur suprême d’émancipation. Je veux croire qu’avec les Belles Lettres nous trouverons de nombreux lecteurs qui partageront notre doctrine !  


J.-C. Zylberstein

Jan T. Gross, Les Voisins

10 juillet 1941. Un massacre de Juifs en Pologne

Traduit de l’anglais ( États-Unis) et préfacé par Pierre-Emmanuel Dauzat – 12 x 19 cm, 240 pages, index, cartes, et cahier central de 28 illustrations noir & blanc, 15 euros, en librairie le 8 mars 2019.

Une historiographie radicalement nouvelle sur l’implication de la population civile polonaise dans l’Holocauste. La parution du livre a nourri une intense polémique aux États-Unis, puis en Europe. Il est toujours censuré en Pologne.

Neighbors/Les Voisins paraît pour la première fois en 2001 aux Princeton University Press. Traduit en France en 2002 chez Fayard, ce livre essentiel était épuisé depuis plusieurs années.

« Les Voisins est doté des vertus cardinales : l’énergie morale, l’effort d’exactitude, et le maintien d’un dialogue continu et ouvert entre les historiens, les sources et le lecteur » London Review of Books

«  C’étaient des Polonais, les voisins des Juifs dans la ville de Jedwabne. Et la révélation du rôle qu’ils ont tenu a déclenché, depuis que l’affaire a émergé, une vague d’introspection agonisante… Les Voisins [est] un livre fin et prudemment renseigné qui garantit, qu’à l’avenir, les Polonais ne verront jamais l’histoire de la Seconde Guerre mondiale de la même façon… La controverse au sujet des Voisins s’est déjà répandue outre Atlantique. » Newsweek

« Les Voisins ébranle avec justesse le discours historique officiel de la Pologne… Un critique polonais compare l’ampleur de la controverse au tapage avec lequel les Allemands avaient accueilli l’étude de Daniel Goldhagen parue en 1996, Hitler Willing Executioners (Les Bourreaux volontaires d’Hitler) qui portait sur la participation de la population civile à l’Holocaust ». Financial Times

« L’étude scrupuleusement documentée de Gross met à mal un autre mythe chèrement gardé : la noble tentative pour sauver des Juifs de la majorité des Polonais…Terrifant et avisé »
Times Literary Supplement

« Une contribution majeure au corpus sur la bestialité humaine déchainée par la guerre… Un livre subtil et prudent sur l’horrible massacre de Jebwabne… Gross est vigilant et rend justice aux faits. » New York Times Book Review

« Les Voisins raconte admirablement une histoire saisissante. Ce livre devrait être lu et commenté largement. »The New Leader

« Il y a 60 ans, le 10 juillet 1941, la moitié de la ville polonaise de Jedwabne a assassiné l’autre moitié… Le titre, Les Voisins, fait l’effet d’une froide dague plantée dans le cœur, mais seulement lorsque le livre a été lu » Newsweek

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Guy de Pourtalès, Louis II de Bavière

ou Hamlet Roi

Suivi de Extraits de la correspondance de Louis II et de Richard Wagner traduite par M. Rouveyre, 12 x 19 cm, nombreuses illustrations en noir et blanc, 288 pages, 15 euros, en librairie le 8 mars 2019.

On le connaît d’abord par ses châteaux, mais comme le soulignait Jacques Bainville, « il serait difficile de compter ce que doit la littérature à la légende de ce malheureux roi ».

Écrit en 1928 par le célèbre romancier, épistolier et diariste franco-suisse Guy de Pourtalès (1881-1941), ce classique issu du cycle biographique à grand succès sur l’Europe romantique était épuisé depuis son édition chez l’Âge d’Homme en 1990, dont voici la reprise.

Louis II, le roi fou, a vécu dès sa jeunesse dans l’exaltation de ses rêves caressés par la musique wagnérienne. « Se trouvera-t-il le prince qui rendra possible la représentation de mon
œuvre ? » demandait Wagner en tête de la Tétralogie. Louis II voulut être ce prince-là : dès qu’il monte sur le trône, il envoie à Wagner un anneau de fidélité, sa photographie en roi adolescent et une lettre pleine de flamme. Wagner vient à Munich : les châteaux en Espagne deviennent des châteaux réels. Dans un enthousiasme délirant, Bayreuth, le théâtre de rêve, sort de sa terre, suivi des châteaux de rêve de Hohenschwangau, Herrenchiemsee, Neuschwanstein… Ce sont les décors de la vie extraordinaire du roi de Bavière Louis II, protecteur de Wagner, fou de musique et d’architecture, qui mit à sac les caisses du royaume et qui se noya volontairement en 1886, parmi les cygnes du lac de Starnberg.

Un prince de conte de fées

Maximilien était très grand, très mince, avec une petite tête toute en front plantée sur un beau buste rond et fin. Les yeux profonds. Une jolie voix douce et haute de dame. Homme sage, sans génie, mais ferme, honnête, ardent à s’instruire et sans autre passion que celle-là. Sa femme, la princesse Marie de Prusse, était surnommée « l’ange », autant pour son visage de madone florentine que pour sa pureté de cœur et sa simplesse d’esprit. Mariée à dixsept ans, elle était arrivée à Munich avec ses jouets et ses poupées quatre ans seulement avant Lola Montès. Elle apportait à cette cour de vieux garçons une fraîcheur naïve et le sang pathologiquement malade des maisons de Brunswick-Hanovre et Brunswick-Hohenzollern. Mais le vieux roi Pâris ne s’inquiétait pas des destins indéchiffrables. Il fit faire le portrait de sa bru pour sa galerie de beautés, où danseuses, filles du peuple, comédiennes et princesses réjouissaient ses loisirs de monarque éliminé.

Max prenait sa charge au grand sérieux, s’entourant de savants et de ministres. Une fois par semaine, le soir, réception au château, en habit et cravate noire. On se réunissait dans son cabinet, qui ressemblait à une chapelle, car il était fort pieux. Et même travaillé par les mystères de la théologie. C’est ainsi qu’il demanda une fois au professeur Jolly « si sa science ne lui permettait pas d’établir avec certitude que les seigneurs de ce bas monde auraient aussi dans l’autre une situation privilégiée ». Messieurs les savants se regardèrent, burent leur « demi » de bière et ne se gênèrent point pour répondre : « Sire, ce sont là des problèmes que vous ne comprenez pas. » Quant à la reine, elle écoutait du mieux qu’elle pouvait les lectures de poètes, mais priait doucement qu’on remplaçât partout le mot « amour » par celui d’« amitié ». Pendant ce temps, le petit Louis, leur fils, jouait sur le parquet à construire des maisons. Ce qui plaisait au grand-père. « Les Wittelsbach, disait-il, ont cela dans le sang. »

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