La minéralogie au IVe s. en Grèce : Théophraste, Les Pierres, traduit en Budé

Avec Théophraste, Les pierres, s’achève l’édition dans la CUF des études zoologiques, botaniques, minéralogiques effectuées au IVe siècle av. J.-C. par les naturalistes grecs Aristote (pour les animaux) et son disciple Théophraste (dans les deux autres domaines). Après la mort d’Aristote, Théophraste a prolongé l’œuvre de son maître par la rédaction des Recherches sur les plantes (5 vol. dans la CUF) et des Causes des phénomènes végétaux (3 vol. ibid.).

Voir la bibliographie Zoologie, botanique et minéralogie par Aristote et Théophraste, en fin d’article.

Texte établi,  introduit et traduit par Suzanne Amigues.

À une époque où la minéralogie ne s’appuyait pas sur l’analyse chimique, un ouvrage traitant des pierres ne pouvait que décrire les minéraux bruts, leurs gisements en Grèce et ailleurs, leurs usages et propriétés. L’ouvrage, rédigé vers 310 av. J.-C., comprenait, d’après l’auteur lui-même, trois livres dont les deux premiers traitaient des pierres précieuses (or, argent) ou particulièrement utiles (cuivre, étain, fer, etc.). Ils ont disparu dès l’Antiquité, victimes des convoitises que l’on imagine. L’ouvrage que voici est donc le dernier livre, réservé aux matériaux de construction et d’ornement, aux teintures dont l’Antiquité faisait grand usage, ainsi qu’à des minéraux apparemment aussi éloignés les uns des autres que le charbon et l’ambre.

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Sommaire détaillé

contenu dans l’introduction du livre

Ch. I Introduction — § 1 Situation de l’ouvrage par rapport à l’exposé antérieur (aujourd’hui perdu) relatif aux minéraux réputés les plus précieux ou les plus utiles. — § 2-3 La genèse des minéraux selon l’auteur. — § 3-5 Diversité de leurs aptitudes, des plus banales (combustibilité) aux plus singulières (coloration de l’eau, pétrification des objets mis à leur contact, etc.). — § 6-8 Caractères liés à une localisation géographique spécifique. Introduction à l’étude de leur particularité la plus évidente : la combustibilité.

Ch. II–VI 1 partie : Les substances minérales massives, de consistance ferme ou dure — § 9-11 Réactions des pierres exposées au feu ou à la chaleur solaire. — § 12-13 Pierres extraites des mines ; particularités de leur combustion. — § 14-15 (début) Minéraux rejetés par les volcans méditerranéens. — § 15 (suite) — 17 Diverses pierres appelées « charbon ». Ch. III — § 18-19 Des « charbons » qui n’en sont pas. — § 20-22 La pierre ponce : sa nature, sa formation ; diversité de son aspect et de tous ses caractères suivant sa provenance géographique. Ch. IV — § 23-27 Pierres fines et semi-précieuses, parfois de dimensions extraordinaires suivant certains auteurs ; rapports confus au sujet de pierres plus ou moins fabuleuses. Ch. V — § 28-29 L’« urine de lynx », apparentée à l’ambre, et les « on-dit » qui la concernent ; présence de l’ambre en Ligurie. — § 30-32 Autres pierres semi-précieuses appréciées pour leur limpidité ou la beauté de leur couleur. Ch. VI — § 33 Pierres de Grèce, aussi belles et rares, et moins coûteuses que les produits exotiques ; des exemples. — § 34-35 Pierres de régions lointaines : Afrique profonde et Asie centrale. — § 36 En marge des pierres proprement dites, la perle qui se forme dans l’huître. — § 37-38 Pêle-mêle, un reliquat de substances réellement minérales (chrysoprase, hématite) et d’autres d’origine organique (ivoire fossile, corail). Ch. VII Annonce implicite d’un élargissement du sujet : — § 39-40 Statut indécis pour les minerais inclus dans des pierres. — § 41-44 Réactions de certains minéraux au contact des outils de fer. — § 45-47 La pierre de touche, son usage ; sa provenance géographique et son aspect.

Ch. VIII–IX 2 partie : Les substances minérales friables ou pulvérulentes, comme la terre — § 48 Formule de transition : « Voilà donc à peu près en quoi consistent les qualités […] des pierres ; celles de la terre sont moins nombreuses mais plus particulières. » Ch. VIII — § 48-49 Transformation de certaines terres par un chauffage (ramollissement) suivi d’un refroidissement (retour à l’état solide) ; l’exemple du verre. — § 50 Choix d’un critère pour le classement des terres : celui de la couleur, familier aux peintres. — § 51-54 Diversité de leurs gisements, sporadiques ou massifs ; la fabrication de l’ocre, de l’extraction dans la mine au traitement par la chaleur sur un fourneau. § 55 Comment le cyanos (colorant bleu-vert) se classe — et s’obtient. — § 56-57 (début) Procédés pour transformer du plomb en céruse, du cuivre rouge en vert-de-gris. — § 57 (suite)-59 Le cinabre (sulfure de mercure) ou vermillon, recherché pour teindre en un rouge plus ou moins vif ou foncé ; légende sur sa provenance, circonstances détaillées et datation de sa découverte dans le monde grec. — § 60 Réflexions sur la créativité de l’art illustrées par un exemple en rapport avec ce qui précède : la fabrication du vif-argent à partir du cinabre. Ch. IX — § 61 Minéraux d’aspect terreux, de couleurs et d’usages variés. — § 62-63 Terres brutes, commercialisées telles quelles en quelques points du monde grec ; leur usage en peinture. Description détaillée de leur exploitation dans la mine de Samos. — § 64 Ambiguïté du nom de « gypse » ; extension géographique des gisements du minéral ainsi désigné. — § 65-66 Nature, extraction et techniques d’utilisation du gypse. — § 67 Usages autres que celui de matériau de construction, du collage des vins au détachage des vêtements. — § 68-69 Récapitulation des propriétés réelles ou supposées du gypse, pour démontrer qu’« il renferme du feu ».

Phrase de conclusion (formulée en termes modestes, mais foncièrement erronée) : « la formation de cette pierre est quelque chose qui s’apparente au feu. »

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“L’urine de lynx” – Extrait

On raconte en effet qu’un jour fut trouvée à Chypre une pierre dont une moitié était de l’émeraude, l’autre moitié du jaspe, comme si sa transformation à partir d’un milieu aqueux était encore incomplète. Il se fait un certain travail sur cette pierre pour la rendre brillante, car à l’état brut, elle ne l’est pas. V. 28 Elle-même possède, comme on sait, un pouvoir extraordinaire, ainsi que l’ «urine de lynx » ; cette dernière est utilisée pour graver les petits cachets, et c’est une matière très dure, comme la pierre ; elle exerce une attraction à la manière de l’ambre, non seulement, au dire de certains, sur des brins de paille ou du bois , mais même sur <des fragments> de bronze ou de fer, pour peu qu’ils soient légers, comme l’a expliqué Dioclès. Il s’agit d’une matière fortement translucide et froide ; celle des animaux sauvages est meilleure que celle des animaux domestiques, et celle des mâles meilleure que celle des femelles, eu égard à la différence de nourriture, ainsi qu’à l’effort et à l’absence d’effort, et, en un mot, à la constitution physique responsable d’une plus grande sécheresse ou, inversement, d’une plus grande humidité . Les gens expérimentés la découvrent en fouillant le sol , car <l’animal> la cache en l’enfouissant et la recouvre de terre, quand il a uriné. Elle demande aussi davantage de travail. 29 En fait il y a aussi l’ambre minéral, extrait de la terre, qui se trouve en Ligurie ; ce dernier s’accompagnerait également de la force d’attraction, d’autant plus visiblement qu’elle est même tout à fait manifeste quand elle s’exerce sur le fer. Il s’agit en ce cas d’une pierre rare et qui se trouve en peu d’endroits ; alors, que celle-ci, bien sûr, soit également créditée de la propriété qu’elle possède pareillement.

(Traduction de Suzanne Amigues, pages 9-10)

Bibliographie du jour

Zoologie, botanique et minéralogie au IVe siècle avant J.-C. en Grèce : Aristote et Théophraste, études naturalistes complètes à la CUF (Budés)

Botanique BL


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